L’île préservée de Port-Cros
Trois perles au large des côtes varoises, trois îles d'Or, nommées ainsi à cause de leur roche de mica, brillant au soleil, Il y a Porquerolles, la plus proche du rivage, le Levant, la plus singulière, il y a enfin Port-Cros. La plus « écolo », la plus montagneuse. Elle est classée 100 % parc national, à la fois sous-marin et terrestre, avec ses 114 espèces d'oiseaux, sa riche flore marine, son sentier des plantes, ses variétés de pins. Port-Cros est d'abord une rade de carte postale, avec ses rares maisons, sa poste pittoresque, son bar pour les plongeurs et son Manoir de charme qui offre des chambres simples mais raffinées, parfois avec salons, sa piscine, son jardin, son domaine. Bref : son âme.
Le Manoir n'est pas, d'ailleurs, un hôtel : c'est un bijou, bâti en 1830 par le duc de Vicence, avec sa façade blanche à tourelles et colonnes. Il est l'unique halte de grand charme de cette île préservée. Pierre Buffet, l'actuel propriétaire, y règne en hôte bonhomme. Et tout, sur Port-Cros, se fait en famille, car ce sont ses propres neveux qui administrent les petites « affaires » du port : le Sun Bistro, qui est le QG croquignolet des plongeurs, comme l'Hostellerie provençale, avec sa vaste terrasse, sa restauration gentiment banale, plus ses cinq chambres. Pierre Buffet a su résister aux sirènes qui auraient voulu faire de son Manoir un asile de luxe. Marceline Henry, sa grand-tante, reçut ici Jean Paulhan, André Malraux, Marcel Arland, bref toute la NRF de la grande époque, mais aussi les RenaudBarrault, qui cédèrent aux charmes du lieu. La mer est là comme une invite. Aujourd'hui, les choses ont à peine changé. Sinon que l'Etat a hérité, en 1963, la majorité des terres, avec en échange la promesse de faire en sorte que Dame Nature demeure l'ardente maîtresse du lieu.
On vient ici, pour une nuit ou plusieurs, parcourir les chemins qui mènent vers l'église et l'école, le mûrier, les chênes-lièges, les restanques, la maison du puits ou le mont Vinaigre. Ce sont là des jalons anciens, que l'on dirait rêvés. On suit les chemins buissonniers et balisés avec soin. On se baigne dans les criques. On flâne. Puis l'on reprend le bateau pour le continent à regret, en retrouvant Le Lavandou qui a bien changé depuis le « rendez-vous » qu'y donnait Henri Salvador, à la mer et au ciel, dans les années 60. Et l'on revient à Port-Cros en remerciant les dieux de la Méditerranée que ce miracle, si près des côtes, soit ainsi préservé.